Centrafrique –  Des progrès ?  Quels progrès ?

 

Il y quelques mois, les médias nationaux avaient annoncé la signature d’une convention entre le gouvernement centrafricain et une société privée ou avec le gouvernement d’un pays ami pour la livraison au pays de 1,000 charrues pour le labour.  Voilà une action positive nous diriez-vous!  Mais, pour des raisons occultes, ces mêmes médias n’avait pas posé aux autorités la question de savoir qui seraient les 1,000 heureux récipiendaires de ces charrues?  A quel prix le gouvernement revendrait ces charrues aux paysans de Mala, de Ndoromboli, de Ngoulinga, de Gambo ou d’ailleurs, qui voudraient s’en procurer?  Ou bien, est-ce que ces charrues volatiseraient comme l’avaient été les dons de ciment et autres dons d’équipements ou de matériels de pays amis au peuple centrafricain?  Cet aspect de la chose mis à part, les médias n’avaient pas demandé quelles organisations dans le pays assureraient le dressage des bœufs qui devraient tirer sur ces charrues?  Comment se ferait ensuite l’acquisition de ces bêtes par les paysans du pays?  L’on serait également curieux de savoir si les paysans sélectionnés avaient appris les rudiments techniques et vétérinaires pour convenablement prendre soin de leurs bêtes dans le village ou dans les villes de l’intérieur?  Et ces mêmes questions, vieilles de plusieurs décennies déjà, s’étaient jadis posées aux techniciens, aux politiques et aux experts nationaux du développement rural et de l’agriculture.  Selon nos observations, ces dernières questions et d’autres liées à une mécanisation de l’agriculture n’avaient toujours pas trouvé de réponses définitives et convaincantes pour ce qui concerne la Centrafrique, même si dans les régions de l’Ouham-Pendé, de l’Ouham ou de l’Ombella-Mpoko, l’introduction de la culture attelée avait connu un modeste succès dans quelques villages.  Et le ministre de l’agriculture et du développement rural et celui de l’intérieur n’avaient toujours pas expliqué au peuple centrafricain pourquoi il serait important de parler de la livraison à l’état de 1,000 nouvelles charrues, lorsque des bandes armées prennent toujours en ôtage les cultivateurs et les éleveurs dans les campagnes du pays?  L’on pourrait également se demander quels sorts avaient été réserves aux charrues qui avaient été introduites dans le pays sous les régimes politiques précédents?  Est-ce que certains artisans qui longeraient l’Avenue de France du côté du quartier Sara ou ceux du quartier Moussa Ladji n’attendraient pas de  transformer très prochainement ces mêmes charrues en outillages plus utiles, machettes, houes ou autres?   Selon nous cette publicité autour des 1,000 charrues n’avait rien apporté de nouveau à un début de résolution véritable des problèmes du développement de l’agriculture dans le pays.  Le gouvernement  qui devrait assurer le leadership n’avait toujours pas tiré de leçons du passé dans ce cas particulier.  Et tout le pays continuerait de danser au rythme des éternelles incompétences de ces politiciens champions de l’opportunisme.

 

Les médias avaient également annoncé une campagne de désarmement des anciens rebelles, accompagnée d’un programme de formation professionnelle et autres.  Et les autorités nationales et leurs experts avaient parlé d’apprentissage de la conduite automobile.  Mais ces mêmes autorités n’avaient toujours pas expliqué pourquoi la conduite automobile serait le crénau économique le mieux indiqué, susceptible d’apporter rapidement aux anciens rebelles l’indépendance financière tant attendue.  Est-ce que chaque participant recevrait à l’occasion un prêt financier adéquat pour l’achat d’un véhicule, afin d’exercer une activité productive comme entrepreneur de taxi et chauffeur, par exemple?  Est-ce que telles enterprises seraient rentables si tout le contingent exerçait la même activité dans le secteur du transport urbain, surtout si en fond de toile, on considérerait toujours l’irrégularité des salaires des fonctionnaires?  Ou encore qui donc donnerait aux titulaires du permis de conduire les crédits nécessaires pour acheter les véhicules utilitaires pour transporter les merchandises sur le territoire national ou pour assurer les liaisons routières avec le Cameroun ou le Tchad par exemple?  Selon nous, la solution que les experts avaient trouvée à la démobilisation des anciens militaires ressemblerait beaucoup à la fameuse solution des départs volontaires assistés (DVA) qui avait été une bonne idée, cependant qui avait été très mal exécutée ou simplement qui avait été un fiasco.  Dans l’exemple de cette solution, le gouvernement avait voulu aller au plus rapide et au plus simple.  Serait-ce donc de cette manière que l’on mettrait en place ces fameuses solutions adaptées et permanentes?  Mais ne devrait-on pas plutôt parler dans ce cas précis d’inadéquation de la formation et du véritable manque de débouché.  Selon nous le leadership avait encore failli.

 

Une autre fois encore, un internaute défendait avec des exemples à l’appui, les performances d’un ancien directeur général de la compagnie de production et de distribution d’électricité, Enerca.  Cet internaute soutenait la nomination de cet ancien directeur général à un nouveau poste important dans une institution financière de l’état.  Il avait énuméré, entre autres, l’achat de motocyclettes pour les agents, d’uniformes pour les employés, etc.  Mais l’auteur apparemment avaient manqué de mentionner que ces actions généreuses n’avaient toujours sorti l’Enerca de sa crise, ni à l’époque, ni aujourd’hui.  Et toutes ces dépenses entreprises n’avaient été destinées qu’à l’apparence, à la laque de l’Enerca.  Les nouvelles fraîches de la performance de cette société nationale indiqueraient toujours les anciens problèmes de l’époque de cet ancien directeur général, à savoir délestages, coupures régulières et besoins d’expansion du réseau non satisfaits.  Pourtant, il y avait le barrage sur la Mbali qui avait été réalisé pour assurer une production plus régulière de l’électricité sous une tension convenable.  Pourquoi donc cet objectif n’avait-il toujours pas été atteint?  Pourquoi les génératrices de Boali n’avaient-elles pas fonctionné à plein régime sous la houlette de cet ancien directeur général?  Pourquoi la ville de Bangui dépendrait-elle essentiellement de deux ou de trois génératrices fonctionnant au mazout dont les coûts de fonctionnement ne peuvent être assurés régulièrement par l’Enerca?  Pourquoi l’Enerca n’avait toujours pas réussi à assurer la couverture en électricité des villes avoisinantes de Bangui comme Mbaïki, Bossembélé et Damara?  Pourquoi l’Enerca n’avait toujours pas cédé la gestion des centrales thermiques des villes principales de l’intérieur du pays à des organisations coopératives locales ou aux autorités élues des municipalités?  Pourquoi l’Enerca n’avait toujours pas investi dans l’énergie solaire?   Vous conviendrez avec nous qu’il avait été très facile pour ceux qui avaient dirigé cette société, de se faire payer des salaires élégants, de règler des problèmes superficielles sans gros impact et de reléguer aux calendes grecques la recherche des solutions permanentes aux problèmes de fond et aux problèmes mêmes de l’existence, de la survie et du développement de l’Enerca.  La question fondamentale aurait été de savoir quelles mesures exceptionnelles le directeur général de l’Enerca devrait entreprendre pour fournir de l’électricité bon marché dans chaque foyer qui le désirerait, au lieu de destiner les moyens limités de cette entreprise uniquement au contrôle des branchements secondaires dits illégaux par exemple?  En écrivant ces mots, nous réalisons pardi que les problèmes graves du pays continuaient à être traités par ces grands fonctionnaires et fils du pays avec la même désinvolture.  De la même manière, entretenir une flotte aérienne nationale n’a pas de sens dans un pays où la classe moyenne serait incapable de se payer un seul billet de passage pour une destination quelconque dans le pays.

 

Ces exemples seraient l’illustration des prétendues solutions proposées par les autorrités du pays pour engager des actions de développement.  Toutes ces solutions avaient été superficielles et ne s’attaqueraient pas aux sources des véritables problèmes.  Les publicités faites autour des petits coups de pouce par ci, par la, n’apporteraient pas le développement économique et social de la Centrafrique.  Peut-être que chaque citoyen, à travers toutes les structures démocratiques mises en place, devrait s’engager davatange et de manière un peu plus personnelle dans la recherche des solutions et dans le choix de décisions, surtout si les honorables députés et le gouvernement de Bozizé n’en ont pas les dispositions.  L’existence des institutions démocratiques, des bureaucraties ou de l’armée nationale ne devraient pas être considérée comme un obstacle à la recherche du progrès.  Si ceux sont les hommes, les femmes ou simplement les autorités administratives, militaires, politiques ou syndicales elles-mêmes qui seraient les véritables obstacles au développement social et économique de la Centrafrique, il faudrait peut être envisager de les faire remplacer par d’autres plus dynamiques, plus entreprenants, plus coopératifs et plus compétents. 

 

Non, mais en réalité quels seraient les buts et les objectifs que ces autorités qui se disent les leaders de la classe politique centrafricaine avaient définis pour le développement du pays?  Nous aurions souhaité que ceux-ci en parlent plus largement et informent le peuple.  Mais qui donc avait dit que les solutions aux problèmes du pays seraient faciles?

 

Jean-Didier Gaïna

Virginie, Etats-Unis d’Amérique (7 Nov 2006)