DE LA PASSION A L’ACTION : BONNE ANNEE 2007.

 

« Chaque génération doit, dans une relative opacité, choisir sa mission; la remplir ou la trahir »

Frantz Fanon

1er janvier 2006- 31 décembre 2006. 365 jours dans la vie d’un homme, d’une famille, d’un peuple, d’un pays et du monde.

 

En cette période de fêtes de fin d’année, qu’il me soit permis, en mon nom et en celui de ma famille ; de souhaiter un joyeux noël et un bon réveillon de la saint Sylvestre.

 

Au crépuscule de 2006, que pouvons nous dire ?

 

Le monde n’a pas beaucoup changé. Les riches deviennent encore plus riches et les pauvres s’appauvrissent davantage.

Les pays dits « grandes puissances »dictent toujours leurs lois et d’autres pays dits « rebelles » (Venezuela, Iran, Corée du Nord, Syrie…) tentent de se mettre hors influence du premier groupe.

 

Dans tout cela, malgré certains indicateurs économiques positifs, l’état de l’Afrique ne s’est pas globalement amélioré. Les grandes pandémies de ce siècle qui sont son lot quotidien ont encore tuées  des millions de personnes. Les effets du néolibéralisme et de certaines réformes préconisées par le FMI  et la Banque Mondiale ont encore asservi davantage. A côté de cela, il y a la gestion patrimoniale de la majorité des états du continent qui embastillent l’espoir d’un quotidien normal.

                  En plus des maux cités, il y a aussi les guerres du Darfour, de l’est de la RDC et de la Somalie qui ont continué d’endeuiller. Et que dire de l’instabilité permanente du Tchad, de la Côte d’ivoire et du nord-Ouganda… ?

 

Dans cette Afrique au tableau peu reluisant (1), notre pays la RCA s’est de nouveau illustré en pôle position. Cette année 2006 qui marque aussi l’an 2 du pouvoir légal de Bozizé, sera si nous ne prenons pas les mesures qui s’imposent ; l’année de décès de notre pays.

 

La panne d’avenir qui sévit en Centrafrique depuis plus d’une décennie maintenant,  et l’état de grande pauvreté de notre pays nous obligent  à jeter de nouvelles perspectives afin de consolider le désir de vivre ensemble. Elles commencent par une autre manière de faire de la politique, ces vœux s’y inscrivent.

 

Du tableau actuel de notre pays (2), au cours de cette année 2006 ; une colère m’enflamme contre le monde politique. Elle est à deux niveaux.

 

DE LA RESPONSABILITE DE BOZIZE DANS LA CRISE DE 2006

 

L'onction populaire qui s'est manifestée par la marche du 28 mars 2003 était l'expression du ras le bol du peuple d'une part et aussi la manifestation de son espoir d'un lendemain différent d'autre part. Dans cette perspective, le Général Bozizé s'était engagé peu de temps après sa prise de pouvoir à ne pas se présenter aux élections présidentielles. Tel le général Gueï, il était seulement le balayeur de la république. Peu de temps après cet engagement, poussé par certains de ses proches et surtout ses parrains, ce dernier va revenir sur la promesse de ne pas se présenter aux présidentielles.

Dans l’élan des mouvements, pour encourager la candidature de Bozizé aux dernières présidentielles, des chambellans n’ont pas manqué d’arguments et d’audace. Certains, plus éclairés, ont parlé de l’homme du 15 mars, comme du Général De Gaule, qui libéra la France des Allemands Nazi en 1944. Que seul lui, au pouvoir éviterait guéguerres et soulèvements au pays. Car, pour nous avoir soustraits des jougs "Patassaux", il pouvait nous garantir paix et sécurité, qui étaient les principaux enjeux des dernières élections.

L’histoire est parfois sans pitié, quand elle conjugue les circonstances, de sorte que le Porte-parole de la présidence centrafricaine, qui lança l’appel, pour solliciter l'aide de la communauté internationale afin de rétablir la paix et la sécurité à Birao, tombé aux mains des rebelles, soit l’un des prêtres, et non le moindre, de cette liturgie préélectorale. Et ceci, au moment même où son analyse d’alors est mise à rude épreuve. Avec un peu de suite dans ses observations doctorales, M. Cyriaque Gonda nous aurait plutôt expliqué la logique qui sous-tend la situation en cours, quand nous sommes collectivement et simultanément mis en joue:

- D'un côté par les anciens "libérateurs" aux ordres de l'homme du 15 mars, qui s'estiment mal payés et qui reprennent les armes et,

-D'un autre, par ceux auxquels l'aventure avaient fait perdre le pouvoir, et nourrit la haine, lesquels ne jurent qu'à reprendre "leur" pouvoir, qu'importe ce qu'en dit le peuple centrafricain,

Pendant que les militaires des F.A.C.A, longtemps bafoués, multiplient les actes de désobéissance les plus graves (connus en 46 années d'indépendance) dans un corps d'armée en temps de crise, en refusant de faire front à l'envahisseur, face à une autorité suprême dont ils rejettent dorénavant le commandement.

Une simple observation nous fait placer au centre de toute cette situation de crise, l'individu qui personnifie le pouvoir central en ce moment au pays, autrement le dit, le Ministre-Président Général Bozizé lui-même, Car s’il n’était pas candidat à sa propre succession:

  1. La situation des fameux libérateurs aurait été résolue depuis, avec la fin d'une transition consensuelle et l'organisation des élections libres, auxquelles Bozizé ne se serait pas présenté. Et, une tentative de la part de certains de ses compagnons d'armes, qui se diraient mal récompensés, de reprendre les armes aurait été conjurée de façon aussi consensuelle, avec une armée centrafricaine unie, obéissant à un pouvoir central digne de respect de la part de tous les fils et filles du pays;
  2. L'idée de Reprendre "leur" pouvoir par les armes - fondement même des actuelles confrontations- aurait éclipsé de l'esprit de ceux qui l'entretiennent. Car ce pouvoir serait exercé par quelqu'un d'autre qu'un Bozizé, dont seulement la présence au palais de la Renaissance encore en ces temps, rappelle le 15 mars 2003 et aiguise la vengeance en d'aucuns, sinon en beaucoup de gens, si on ajoute sa gestion scabreuse du pouvoir de l'État en ce moment;
  3. Aussi, une cartographie de l'échiquier politique national réel, donc libre de tout montage boiteux et d’arithmétique farfelue, tels ceux hérités des dernières élections présidentielles au pays, auraient diminué les ardeurs bellicistes à beaucoup de compatriotes. Malheureusement les faits présents  semblent valoriser le son des armes, ce qui laisse libre cours aux rêves de certains, tels ceux qui avaient  pris le contrôle de Birao et leurs comparses.

La situation commence à beaucoup durer et jamais un certain noyau des Faca n'acceptera (je l'espère) de soumettre la République centrafricaine, dans son ensemble, à une joute complaisante de règlement de comptes entre un groupe de filles et fils du pays, englués dans une conception très limitée, mafieuse et barbare de la Chose nationale. Cette situation appelle notre conscience civique et patriotique à nous tous, les autres filles et fils de Centrafrique. Car, il est clair aujourd'hui, à la lumière de l'évolution sur le terrain, qu'en reniant sa parole de militaire, pour se porter candidat et rester à la tête de l'État centrafricain, l'homme du 15 mars 2003 nous a imposé la loi des armes, qui est entrain de prêter une conception dramatique à la notion de l'État : l’État est mort, vive l’État. Il a fait de la RCA, le creuset des affinités bellicistes; en d'autres termes, le creuset des rebellions de tous genres pour accéder au pouvoir, tout comme l'administration Américaine a fait de l'Irak, le berceau du terrorisme islamiste  international. Il semble acquis dorénavant que savoir manipuler les armes est une des voies, avec celles que permet la dernière Constitution, de prendre le pouvoir de l’État. Quant à la notion et la gestion de l’État, on peut les apprendre sur le tas.

 

Ce plaidoyer ne remet pas en cause la légalité et la légitimité du régime du Ministre Président Général Bozizé. Mais il permet de souligner une des causes objectives de la rébellion armée qui sévit dans le nord (Est et Ouest) du pays, et que le régime de Bangui ne peut et veut reconnaître. Car j'ai acquis l'intime conviction qu'en ne se présentant pas aux élections, Bozizé aurait fait taire toutes les raisons évoquées aujourd'hui pour attaquer le pouvoir central. De même, j'ai acquis la conviction que le postulat de salut public via les mouvements armés a fait faillite, il a démontré ses limites dans la gestion du Centrafrique de ces quarante(40) dernières années et participé à enlever à la politique(au sens noble du terme), sa raison d’être et sa valeur constructive.

 

De l’incohérence des élites politiques

 

Bozizé s'est assis inéluctablement et confortablement dans le wagon de sa destination finale, c'est à dire la galère et ensuite l'exil. C’est un fait qui sera déterminant lors des prochaines consultations de 2010. Nonobstant cela, l’opposition Centrafricaine s’est illustrée ces derniers mois d’une manière qui ne s’aligne pas derrière les intérêts supérieurs de l’État. Comment comprendre que l’opposition légale exige du pouvoir de Bangui qu’il négocie avec un groupe de gens qui considèrent les armes comme un moyen de règlement des problèmes politiques internes?

 

Au-delà des situations politiques et nombrilistes qui opposent les deux faces de la vie politique de notre pays, lorsque les intérêts suprêmes de la nation l’exigent, opposition et pouvoir doivent s’aligner.

Fondamentalement, le problème des partis de l’opposition avec Bozizé se trouve dans son aspect managérial, il est politique. Sur le plan institutionnel, aussi bien le régime de Bozizé que l’opposition politique tirent légalité et légitimité de la constitution de décembre 2OO4. Or, en ne reconnaissant, ni l’une ni l’autre à Bozizé qui, non seulement, est le garant de l’application de cette Constitution, mais aussi sa personnification, c’est aussi à l’opposition officielle que la rébellion s’en prend. Encore une fois, qu’on se le prenne pour dit, le pouvoir de Bangui est tout, sauf illégal et illégitime. Moi-même, je me pose beaucoup de question, lorsque je vois la gestion quotidienne de ce pouvoir. Il m’arrive aussi de penser à l’état dans lequel sera le pays, lorsqu’en 2010, Bozizé devra remettre son mandat entre les mains du peuple.

Mais cette réalité n’autorise pas l’opposition à s’allier avec n’importe quelle entité qui veuille en découdre avec Bozizé en dehors des cadres légaux, il existe d’autres moyens que le recours aux armes. Or sur ce point, les intérêts de la rébellion sont antinomiques avec ceux du peuple, de la république et d’une opposition légale responsable.

 

La démocratie commence par un sens sérieux de responsabilité. Bozizé et les rebelles sont tous les deux imprégnés de la culture de sang, ils n’ont que ça comme mode d’expression et sont par conséquent à combattre. Surtout à un moment où, il semble clair que dans l’esprit du Ministre   Président, l’opposition politique et armée constituent une seule et même réalité avec laquelle il refuse de négocier et qui ne mérite que méfiance. Il est dommage que c’est le gouvernement français qui interpelle le gouvernement centrafricain à dialoguer avec l’opposition légale.

 

A cette opposition que tout oppose mais qui se trouve unit face à la rébellion et à l’intervention de l’armée française, ce message est destiné : Pour ce peuple, pour votre peuple, pour vos responsabilités communes, pour vos souffrances communes, pour votre substrat ; une nouvelle perspective fondée sur des choix éthiques et moraux profonds s’impose ; sans quoi vous aurez tout perdu, perdu ce que vous avez de plus précieux c’est à dire le rêve, le Centrafrique et votre raison d’être.

 

Face à ce tableau peu reluisant, que souhaiter et que faire en 2007?

 

Ce ne sont peut-être que des mots, mais ce sont mes vœux. Je souhaite vivement que 2007 soit une année de paix dans le monde et de lutte contre toutes les injustices. Je formule les vœux que l’année 2007 apporte avec elle à l’Afrique toute entière, pleine d’espérance et de transformation vers le bien-être global.

 

 

J’ai parlé de tout, mais je n’ai pas parlé du RDC et de CBM.

 

Lorsque j’annonçai le 08 Décembre 2004 ma décision d’intégrer le RDC, je disais ceci en guise de conclusion : « J’AI CHOISI la paix, la sécurité, l’unité du peuple centrafricain, la sagesse et l’humilité au respect de l’histoire et de la réalité. PUISQUE LES REALITES ET LES NECESSITES NATIONALES FINISSENT TOUJOURS PAR TRIOMPHER, je me mets au service de notre pays. » (3), cette conclusion est plus que jamais d’actualité.

Aujourd’hui la paix, la justice et le progrès (4) sont les trois priorités pour notre pays. Et au  RDC, notre gestion du pouvoir additionnée à nos erreurs, nos fautes et bévues font que si nous prenons les décisions qu’il faut en additionnant intelligemment nos atouts, le peuple se rendra à l’évidence que nous constituant l’unique alternative crédible à Bozizé. Mais pour que cela se réalise, nous devrons faire preuve d’une intelligence manifeste.

Or faire preuve d’intelligence manifeste signifie ici se séparer de certains réflexes et comportements politiques digne des années 70/80. C’est aussi refuser les prises de position et actions qui vont contre les intérêts supérieurs du peuple.

Faire preuve d’intelligence manifeste, c’est relever l’électrocardiogramme politique plat de notre pays et ne pas se faire complice de la sous-traitance de l’animation politique à la presse privée.

Enfin, faire preuve d’intelligence manifeste, c’est commencé à préparer dès maintenant 2010 et à faire don de soi et de ses ambitions afin  de faire œuvre d’utilité et de salubrité publique en 2010 lorsque nous retournerons aux urnes. 2007 est à ce titre là, l’année charnière.

Que deviendra CBM en 2007 ?

 

En 2007, j’aimerai retrouver un Centrafrique en paix, en marche vers le bien-être social de ses masses où celles-ci deviendront les acteurs des transformations tant attendues. En 2007, j’aimerais retrouver un pays en marche vers plus de justice, d’intégration et d’excellence. En 2007, j’aimerai retrouver un pays moins frileux ; des compatriotes moins hypocrites et une nation unique dont la somme des diversités constitue l’élément identitaire principal mais aussi et surtout, le socle de son unité et de sa fierté nationale. En 2007, j’aimerai retrouver un pays où les libertés matérielles et immatérielles seront non seulement garanties dans l’esprit et le texte ; mais aussi dans la réalité. Un Pays où tous ceux de ma génération et des générations périphériques, qui l’ambitionnent, pourront en toute liberté prendre part à l’animation de la cité, de leur cité en agissant afin d’être clairs sur les actions et les réalités aux fins d’imaginer un avenir pour le Centrafrique et les Centrafricains. En 2007, j’aimerai voir les élites de notre pays dans une dynamique capable de créer le progrès. Car, juguler  l’actuelle crise sociale et sociétale revient à juguler la crise économique et, juguler la crise économique c’est juguler la crise des élites (politique, intellectuelle, économique, sportive, culturelle, religieuse).

 

 

  

De tout cœur avec mes compatriotes, victimes et prisonniers de ses élites; je formule les vœux que 2007 soit l’année d’un réveil multiforme de notre pays où chaque vie humaine est sacrée et où chez chaque citoyen, se manifestera un refus à vivre permanemment dans la misère et l’instabilité.

 

Les vers qui suivent sont un requiem pour une aube nouvelle en Centrafrique. Ils sont en hommage à ces dizaines de milliers de Centrafricains, femmes et hommes ; morts sans voir un début d’amélioration de nos conditions et  à cette grande masse d’aujourd’hui qui broie le noir chaque jour où l’espoir disparaît et la vie cède le terrain à la survie.  

  

 

Bonne Année 2007.

 

 

 

Requiem pour une aube nouvelle en Centrafrique : Le Bourreau du Centrafricain, c’est lui même

 

Dans nos bouches le mot tribu ils ont mis ;

Et son sens, ils ont perverti ;

Dans nos yeux la haine, ils ont injecté ;

Dans nos bras, des haches ils ont placés ;

Dans nos champs, des armes ils ont caché ;

 

Mais,…

 

Dans nos maisons les marmites ils ont vidé   ;

Dans nos hôpitaux, la mort  ils ont semé;

Dans nos quartiers la désolation et l’humiliation ;

ils font pleuvoir ;

Dans nos villages le désespoir et la désertification ;

Ils nous servent à boire ;

Dans nos écoles ils ont déversé un torrent d’inculture et de méconnaissance ;

Dans le monde entier, leurs propres enfants, ils ont abandonné ;

en déserrance et sans aide, partis pourtant étudier ;

Dans notre pays, la pauvreté extrême ils font régner

et depuis vingt ans, le SIDA ils laissent nous décimer.

 

 

Clément BOUTE-MBAMBA,

Une Passion pour le Centrafrique et les Centrafricains

 

 

  

 

1 : Vous remarquerez que j’ai volontairement mis le point sur ce qui n’a pas marché d’un survol général ;

 

2 : Le volet sécuritaire et politique ;

 

3 : C’est mon choix : Acte 2 (http://www.sangonet.com/actu-snews/ICAR/ActuC/Phase2ClementBM.html )

 

4 : le progrès, c’est la maîtrise de la nature et de l’espace au profit de l’homme.  C’est aussi  la réduction de l’effort et le gain de temps dans la production et l’acquisition des biens et services dont a besoin l’Homme (le Centrafricain) pour vivre dignement. C’est aussi la réduction des inégalités, des disparités entre les citoyens et la possibilité (garantie) accordée à tous de s’émanciper par le travail producteur, par une éducation de qualité, par l’accès à des services sanitaires et sociaux équitablement repartis sur l’ensemble du territoire national, par une eau potable accessible à tout le monde, par un environnement sain, par un logement  décent  et  par l’ouverture au reste du monde grâce à des outils modernes de communication.

 

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