Déclaration
du Général d'Armée André KOLINGBA à l'occasion du DPI
- Monsieur
le Président du Présidium du Dialogue Politique Inclusif,
- Mon Cher
Frère Ange Félix PATASSE, Ancien Président de
-
Messieurs et Mesdames, Chefs de missions diplomatiques, Représentants des
Organismes Internationaux accrédités en République Centrafricaine
;
-
Mesdames, Messieurs les Représentants des parties politiques ;
- Frères
et Sœurs délégués aux assises du Dialogue Politique Inclusif
;
-
Honorables Invités,
- Mesdames
et Messieurs ;
Malgré le
changement intervenu en mars 2003, notre Peuple, le Peuple centrafricain se
trouve toujours dans la tourmente des épreuves depuis bientôt 15 ans, et l’on
est amené à se demander pourquoi ? Louons tous l’Eternel des armées, car sa
miséricorde en faveur de notre pays dure à toujours sinon, que serions nous
devenus ?
Là où nous sommes
désormais arrivés, chers compatriotes, un bref retour sur l’histoire mérite
d’être fait afin que l’on puisse valablement dire, plus jamais cela
!
En effet, Mesdames
et Messieurs, de 1981 à 1993, nous avions engagé notre pays,
Ainsi, nous avions
su allier l’esprit de rassemblement sans exclusif, le respect des droits de
l’homme, les conditions sécuritaires du pays, les aspirations au bien-être de la
population et la paix sociale, pour convaincre les partenaires bilatéraux et
multilatéraux à ouvrir leur sas afin que
La mise en œuvre
par le Gouvernement de plans et programmes économiques courageux a permis
d’obtenir d’importants résultats dans tous les secteurs socioéconomiques dont
quelques éléments sont ici donnés à titre d’exemple :
- dans le domaine
de l’Electricité, le renforcement en 1990, de la capacité de production
thermique par un nouveau groupe électrogène de 6 Méga Watt, la construction et
la mise en service d’un barrage hydroélectrique sur
- dans le domaine
de l’hydraulique, la mise en œuvre depuis 1984, d’une dizaine de programmes
d’hydrauliques villageoises caractérisés par des campagnes de forages d’eau
potable pour les zones rurales grâce aux Fonds Danois, plus de 1000 points d’eau
moderne avaient été installés, la vulgarisation, dès 1981, de la consommation
d’eau potable par la création de nouveaux centres de production et de
distribution dans cinq villes de l’intérieur (Bossangoa, Ndélé, Bambari,
Berbérati, Carnot) et l’initiation de la gestion privatisée de bornes fontaines
d’eau potable ;
- dans le domaine
de la santé, la construction de l’Hôpital Communautaire, de l’Hôpital de
l’Amitié, du Complexe Pédiatrique et la construction de la faculté des sciences
et de la santé, la construction de 5 pavillons pédiatriques entièrement équipés
à Berbérati, Bouar, Bambari, Bossangoa et Bangassou, le nombre de médecins est
passé de 72 en 1981 à 158 en 1993, le taux de couverture médicale chez les
enfants de moins d’un an est passé de 5 % en 1980 à plus de 77 % en 1990 ;
- dans le domaine
des affaires sociales et de la promotion de la femme, l’appui à l’élaboration
d’un code de la famille par la prise en compte de la dimension sociale dans le
programme d’ajustement structurel incluant des actions en faveur de la femme
;
- dans le domaine
des télécommunications, le projet MERT et le projet domestique « TELCASAT » qui
ont permis, par satellite, de désenclaver rapidement BANGUI et certaines villes
de province notamment Bambari, Berberati, Bouar, Bangassou, Bossangoa, Carnot,
Bria, Mbaïki et Kembé, ont positionné
- dans le domaine
de l’agriculture, en 1990 la production du manioc a atteint 516.400 tonnes,
celle du maïs, 61.600 tonnes et celle de l’Arachide, 103.200 tonnes, la
production du coton est passé de 20.000 tonnes en 1981 à 55.000 tonnes environ
en 1989, celle du café de 3.000 tonnes environ à 40.424 tonnes en 1989
;
- dans le domaine
de l’élevage, les têtes de bovins sont passées de 1.735.000 en 1981 à 2.700.000
en 1991 et celles des zébus transhumants de 2.038.000 à 2.677.000 têtes de 1984
à 1991 ;
- sur le plan
politique et institutionnel, en 1987,
Chers
Compatriotes,
En 1991, nous avons
fait prendre à notre pays un tournant décisif marqué par le passage au
multipartisme, système politique compatible avec la doctrine économique du
Rassemblement Démocratique Centrafricain (RDC). Nous étions et demeurons
convaincu qu’un système de pluralisme politique bien géré est à même non
seulement, d’assurer la paix sociale, mais aussi de créer un environnement
propice à la croissance économique et à la lutte contre la pauvreté.
Les élections
présidentielles et législatives groupées de 1993, qui ont conduit à un
changement d’hommes à la tête de l’Etat centrafricain auraient dû être le point
de départ pour un renouveau de la nation. Elles ont plutôt sonné le naufrage
progressif du pays, soumis à la gestion la plus calamiteuse qu’il ait jamais
connue.
En effet, c’est un
Centrafrique en paix et uni, où l’autosuffisance alimentaire était assurée ainsi
qu’une caisse de l’Etat solvable que j’ai laissé à mon successeur en 1993. Toute
œuvre humaine étant faillible, il appartenait aux nouvelles autorités de
l’époque d’apporter des corrections là où il y avait imperfection afin de
garantir au peuple un développement humain durable !
Hélas, il en avait
été autrement, il n’est resté de toutes les réalisations héritées que ruine et
désolation, caractérisées par une gestion chaotique sans programme de
gouvernement. Le seul et unique programme de développement proposé au peuple se
résumait en un seul point, comment éliminer Kolingba et les Yakoma politiquement
et physiquement de l’administration et de l’armée.
Le mensonge était
institué en mode de gestion et les forces publiques étaient alors détournées de
leur rôle sacré, l’honneur et la patrie, devenant des bourreaux du peuple,
utilisées à mettre à mal les droits de l’homme. Les armes de guerre distribuées
pour sécuriser un régime en place, ont fait le lit de la violence, du banditisme
et des braquages devenus un moyen de survie pour ceux des centrafricains qui,
poussés par la faim et le désespoir, optent ainsi pour le suicide.
Ainsi, de 1995 à
1996, la mauvaise gouvernance patente du régime issu des élections de 1993 avait
plongé
Cette crise avait
été caractérisée par des affrontements armés récurrents, la généralisation de
l’insécurité sur toute l’étendue du territoire, la destruction d’une bonne
partie du faible tissu économique, la désorganisation de l’administration
publique et la destruction des systèmes éducatif et de santé. Elle avait ébranlé
et fragilisé les bases de l’unité nationale, fragmentée la nation et aggravée la
pauvreté tant en milieu urbain que rural. Il y eu déchirements et blessures !
Les gouvernants de l’époque, n’avaient laissé aucun autre choix aux
Centrafricains.
Honorables
Invités,
Les luttes
multiformes des filles et fils du Centrafrique ont abouti au coup d’Etat du 15
mars 2003 que l’humilité nous engagerait à reconnaître que c’est l’œuvre de
tous. Si cette transition a certes décrispé la situation politique nationale,
elle n’a pu, en dépit des recommandations du Dialogue National, engager un
programme hardi en vue de la refondation de l’Etat et de
Or, ce changement,
nous l’avions voulu pour délivrer le peuple de la souffrance, de l’injustice, de
la misère et de la tyrannie ; mais hélas, ce n’est pas le cas. Et les dernières
élections de 2005 au contour que l’on sait, n’ont rien
arrangé.
Au lieu de proposer
au peuple un programme politique cohérent, capable de prouver aux yeux de la
communauté nationale et internationale que nous avions eu raison de recourir à
la force, tout est parti comme si rien n’a changé. Nous sommes à nouveau
repartis avec les mêmes objectifs politiques qui se résument à la politique de
la terre brûlée et de la terreur caractérisée par :
- les multiples cas
d’assassinat et de villages rasés dans le Nord du pays dont les auteurs pavanent
encore en toute liberté et impunité ;
- le départ en
exile de centaines de milliers de compatriotes ;
- des centaines de
milliers de compatriotes contraints de vivre dans la forêt loin de leur terroir
; n’eut été l’aide humanitaire que le sort de ceux-ci serait irrécupérable
;
- l’extrême
pauvreté qui jette à ce jour dans la rue, femmes, enfants, vieillards, sans
oublier la situation des diplômés sans emploi qui ne savent plus à quel saint se
vouer…
Les raisons de fond
à toutes les crises d’hier sont encore d’actualité à savoir, le non respect des
engagements pris et de la parole donnée, le mensonge érigé en mode de gestion,
l’absence de dialogue, la multiplication des manœuvres en vue de confisquer et
dévoyer la démocratie et la politique d’assassinat et de
terreur.
Et pourtant, la
sagesse devrait nous faire réfléchir et dire qu’entre 1995 et 1996, c’est la
mauvaise gouvernance patente du régime de l’époque qui a plongé le pays dans une
grave crise politico-militaire sans précédent qui a perduré et ne fit que
s’accentuer, jusqu’en 2001.
Les mêmes causes
produisant les mêmes effets, les diverses rébellions qui agissent en ce moment
dans notre pays ne doivent pas nous surprendre. Les interventions de quelques
uns des responsables sur les ondes des radios en disent long. Nos Délégués à ce
Dialogues rentreront dans les détails.
Chers
compatriotes,
Filles et
Fils du Centrafrique,
J’ai été
constamment à l’écoute de ce que voulait mon peuple. J’allais dans le sens de ce
qu’il souhaitait, si je n’arrivais pas à le convaincre du bien-fondé de ma
position, affirmant toujours que seul l’avenir dira, qui a raison.
Malheureusement, comme le souligne le dicton : l’expérience instruit mieux que
les conseils !
Lorsqu’il s’est agi
de ce nouveau Dialogue, je me suis posé les questions suivantes : sommes-nous,
hommes politiques, à l’écoute du peuple ? Avons-nous écouté les gémissements et
les cris du cœur de nos compatriotes ? Sommes-nous sensibles à leur misère et à
leur pauvreté et surtout à un moment où la famine s’est installée dans notre
pays ?
Si la réponse est
oui, ces assises ne devraient pas avoir lieu ! Car en installant un dialogue
permanent comme le Dialogue National l’avait recommandé, nous aurions depuis
résolu plusieurs problèmes et laissé le Gouvernement répondre aux besoins
quotidiens de la population. Malheureusement, ce Dialogue en est un de trop,
telle est la pensée du peuple !
En acceptant de
prendre part à ce Dialogue Politique Inclusif, je me suis laissé convaincre par
une seule chose : il faut aller poser la bonne question, notamment
:
Si Kolingba a mal
géré, il a laissé démocratiquement le pouvoir à Patassé pour mieux gérer, si
Patassé a mal géré, Bozizé a pris le pouvoir par la force pour mieux faire que
nous tous. Alors, pourquoi après un Dialogue National, qui a rassemblé tous les
fils et filles du pays qui se sont pardonnés et pris un ensemble de
recommandations constructives pour le pays, on nous parle encore de tribalisme,
d’affairisme, de milices armées, de violations de droits de l’homme, d’impunité
ou simplement de mauvaise gouvernance …?
Et pourtant aucun
régime en RCA n’a été soutenu comme celui de BOZIZE. Le pays a reçu des appuis
financiers de toutes les institutions sous-régionales, régionales, et
internationales ainsi que des pays amis. La situation du pays est alarmante, ce
régime est en train de faire mourir le peuple par inanition. Les arriérés de
salaires, de pensions et bourses ne sont toujours pas résolus. Et que dire de
tous les prix qui ne cessent d’augmenter au jour le jour !
Je dis à mon frère,
le Président BOZIZE, de laisser sa chance à notre démocratie et de proposer aux
compatriotes des alternatives pour sortir durablement de cette crise car la
situation est grave, et l’on ne peut indéfiniment continuer à se fier aux
discours trompeurs sur la pseudo-paix qui règnerait dans le pays et la
pseudo-réussite économique dont les résultats tardent à venir… Car il y a
problèmes…
En effet, plusieurs
éléments caractéristiques résument la situation du pays :
Premièrement, il y a
impolitesse envers le peuple qui est au quotidien ignoré et délaissé par les
gouvernants. En effet, en célébrant régulièrement le coup d’Etat du 15 mars
2003, le régime viole non seulement les dispositions pertinentes de
Pendant qu’à Bangui
nous faisons les fêtes, dans l’arrière pays, nos frères et sœurs sont massacrés
entre autres par les forces sensées les défendre et n’ont pas à manger! Les
étudiants font grèves pour réclamer leur droit, le plus haut responsable leur
répond « ils peuvent faire leur grève car mes enfants ne sont pas à l’Université
».
Des éléments armés
étrangers (appelés libérateurs) viennent ériger un drapeau étranger en lieu et
place de l’emblème centrafricain dans les locaux de
Deuxièmement, Il y a incitation
à la vindicte. Le serment prêté ainsi que le préambule de
Pis encore, du
sommet de l’Etat on incite les forces de défense à obéir à la loi du Talion
singulièrement dit ″mbana na mbana″ à l’exemple des affaires de l’église de Kina
et surtout de Yango Capita et Sanzé qui nous rappelle tristement l’affaire «
Chabardo et compagnie » !
Troisièmement, l’administration
est vidée de sa substance. L’amateurisme, l’incompétence, l’inexpérience,
ajoutés à la corruption et l’indiscipline, sont aujourd’hui les traits
caractéristiques de notre administration. Ma tristesse est profonde de savoir
que notre pays est à ce jour perçu comme le pays où la médiocrité est couronnée.
Le non paiement des salaires à terme échu et les arriérés qui perdurent ne sont
pas prêts d’arranger les choses.
Enfin,
quatrièmement, la gestion
personnalisée au détriment de bonnes règles établies. Pour une affaire qui ne
nous concerne pas, nous rompons des relations diplomatiques avec un pays frère
comme le Soudan par saute d’humeur. L’absence de transparence dans les grandes
décisions de l’Etat notamment le dossier de Unitec-BENIN et beaucoup de
conventions objet de contentieux ruinent les énergies au plan national et
réduisent le dernier pavé de confiance que la communauté internationale voudrait
bien nous accorder.
Ce tableau non
exhaustif mais sombre démontre que nous devons saisir l’opportunité de ce
Dialogue Politique Inclusif pour prouver au peuple que nous sommes à son écoute
en trouvant des solutions à leurs problèmes et en lui donnant de l’espoir.
En ce qui me
concerne, l’examen du document produit par le Comité Préparatoire du Dialogue
Politique Inclusif révèle que pour une bonne partie, plusieurs des mesures
proposées sont déjà contenues dans le programme de réduction de la pauvreté
mais, nous découvrirons que ces mêmes mesures se retrouvent dans les
recommandations du Dialogue National, de tels ou tels Etats Généraux ou
Séminaires !
C’est pourquoi,
j’estime pour ma part qu’au cours de ce Dialogue, nous nous attacherons beaucoup
plus à comprendre et à trouver des réponses au problème des rébellions armées,
des salaires, des pensions et des bourses qui ne sont pas payés, de la gestion
des retraités, de la mobilisation des recettes de l’Etat particulièrement le
problème de
Mais la question
fondamentale à se poser est celle de savoir pourquoi les résolutions du Dialogue
National n’ont pas été appliquées de sorte qu’aujourd’hui plusieurs familles ne
savent pas qui a tué les leurs et que sont devenus leurs restes alors que la
commission vérité réconciliation avait été prévue pour cela par le Dialogue
National ! C’est ici le lieu de se demander qu’est devenu ce Comité qui a
pourtant été doté de tous les moyens ?
Centrafricaines,
Centrafricains,
Je ne suis ici, à
ce Dialogue Politique Inclusif, ni pour le Rassemblement Démocratique
Centrafricain (RDC) mon parti, ni pour moi-même, je suis ici pour le peuple que
j’ai eu à servir, que je servirai encore, pour son bien être et pour la paix.
C’est pourquoi, encore une fois, je demande à Dieu de pardonner tous ceux qui
ont attenté à ma vie et qui continue à y méditer, de même, je demande pardon au
peuple pour la peine que les hommes politiques continuent à leur
infliger.
Je le dis et je le
répète que, contrairement à ce que certains, dans des desseins politiciens et
électoralistes, ont voulu faire croire, j’ai travaillé avec tout le monde et le
droit de réponse de mon Parti à ce sujet est à votre disposition. Les archives
de l’Etat sont là, pour l’attester, et la plupart de nos compatriotes de bonne
foi peuvent en témoigner. Aussi, nous devons cesser de mentir au peuple. Il faut
dire la vérité. Et à ce propos, j’ai demandé à mon parti de proposer dans
l’accord politique issu de ce dialogue, une clause allant dans le sens de la
création d’une commission internationale pour auditer l’administration et faire
la lumière sur le tribalisme dans l’administration et
l’armée.
Chers
Compatriotes,
Arrivant au terme
de mon intervention, qu’il me soit permis d’adresser à mon Frère El Hadj Omar
BONGO ODIMBA, Président du Gabon, Président du Comité ad hoc dans l’espace CEMAC
sur les questions centrafricaines, pour tous les efforts qu’il ne cesse de
déployer afin de redonner espoir de vie au peuple
centrafricain.
Je voudrais, au nom
de mon Parti, le RDC, remercier la communauté internationale, particulièrement
les partenaires au développement pour le soutien qu’ils ont apporté à
l’organisation de ce dialogue dont la mise en œuvre de l’Accord Politique
permettra, j’en suis convaincu, de réunir les conditions de mise œuvre de toutes
nos stratégies de réduction de la pauvreté.
J’adresse tous mes
encouragements à tous les Délégués qu’ils soient de la majorité, de l’opposition
démocratique, de l’opposition armée, de la société civile et des confessions
religieuses pour tous les efforts qu’ils auront à consentir durant 15
jours.
Pour ma part, je ne
saurai terminer mon propos sans proposer une solution radicale de sortie de
crise. Nous devrions arrêter l’hémorragie au plan politique et économique et
redonner espoir au peuple centrafricain. Je propose donc clairement que
l’on aille vers une transition politique dont les contours seront définis par
votre assise.
Que
Je vous
remercie.