Un ancien PM centrafricain dénonce "l'Afrique suicidaire"

PANA, Paris, France 18 mai 2002 - Les Africains sont aujourd'hui les principaux fossoyeurs de leur présent et de leur avenir, a estimé samedi à Paris l'ancien Premier ministre de la République de Centrafrique (RCA), M. Jean-Paul N'Goupandé.

Selon M. N'Goupandé, qui vit actuellement en exil en France, plus de quarante ans après les indépendances nationales, les Etats africains ne peuvent plus imputer la responsabilité de leurs malheurs au néocolonialisme, au colonialisme des grandes
puissances ni même aux milieux d'affaires étrangers.

"Aujourd'hui, les Etats sont liquéfiés dans la plupart de nos pays, les gardes prétoriennes et les milices polico-ethniques ont supplanté l'armée, la police et la gendarmerie qui ne sont plus que l'ombre d'elles-mêmes", s'est indigné le Premier ministre de la transition démocratique de la RCA dans une tribune libre au quotidien français Le Monde.

Interrogé sur les efforts qu'il a fournis du temps où il était aux affaires pour corriger dans son pays les travers qu'il dénonce aujourd'hui, M. N'Goupandé a répondu que son action avait à l'époque été constamment entravée par le président Ange Félix Patassé.

"J'estime avoir fait tout mon possible du temps où j'étais Premier ministre pour orienter la RCA vers une autre voie de gouvernement, mais mon action a été systématiquement contrariée", a déclaré M. N'Goupandé à la PANA, renvoyant au livre qu'il a consacré à la question.

Les Africains gagneront en crédibilité lorsqu'ils seront capables de se regarder en face et de reconnaître enfin que ce qui leur arrive est de leur seule faute, a ajouté le député centrafricain en exil à Paris dans son texte intitulé: "L'Afrique suicidaire".

En dépit du tableau très sombre qu'il dresse de la situation actuelle du continent africain, l'opposant centrafricain, qui était cité comme "témoin spécial" lors du procès des auteurs présumés de la tentative de coup d'Etat de l'année dernière contre le président Patassé, estime que l'Afrique a encore des chances de s'en sortir.

M. N'Goupandé, qui a publié au début de cette année aux éditions de La Découverte à Paris "L'Afrique sans la France", propose ainsi qu'un appui "franc et massif" soit apporté par la communauté internationale aux pays africains qui manifestent clairement une volonté de s'en sortir "par le sérieux et le travail acharné".

Sur les 53 Etats du continent, plusieurs peuvent s'en sortir, a insisté l'ancien Premier ministre centrafricain, espérant que leur exemple aura alors un effet d'entraînement sur les autres.

"L'intérêt de l'Europe, de l'Afrique et du monde commanderait qu'ils soient appuyés, au lieu du saupoudrage local qui n'a jamais induit un cycle de développement", a souligné M. Jean-Paul N'Goupandé.

Paris - 18/05/2002


Dossier L'Afrique sans la France par Jean-Paul Ngoupandé [Ils en parlent]