Coronavirus: la Chine monte au créneau et corrige le tir vis-à-vis des Africains

 

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Coronavirus et discriminations en Chine : l’Afrique monte au créneau

 


Ces derniers jours, des Africains se sont dits victimes d’expulsions, d’interdictions d’entrer dans des commerces, de placements en quarantaine et de dépistages abusifs.

Le Monde avec AFP Publié le 15 avril à 12h29

 

Dans le quartier de Little Africa de Canton, en mars 2018
Dans le quartier de Little Africa de Canton, en mars 2018. FRED DUFOUR / AFP

 

Après l’Union africaine (UA), le Nigeria est monté au créneau mardi 14 avril pour dénoncer des discriminations « inacceptables » à l’égard de ses ressortissants en Chine à la suite de la découverte de cas positifs au Covid-19, alimentant une polémique embarrassante pour Pékin, en pleine offensive de charme sur le continent.

Ces derniers jours, des Africains se sont dits victimes d’expulsions, d’interdictions d’entrer dans des commerces, de placements en quarantaine et de dépistages abusifs, après la découverte de plusieurs cas positifs au nouveau coronavirus parmi la communauté nigériane de la métropole de Canton.

 

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Mardi, le ministre des affaires étrangères nigérian, Geoffrey Onyeama, a reçu l’ambassadeur chinois à Abuja. Une audience aux airs de convocation, pour l’informer que « la situation est extrêmement pénible et inacceptable pour le gouvernement et le peuple nigérians et que nous voulons une action immédiate ». L’UA avait déjà exprimé samedi son « extrême préoccupation » sur le sort des Africains et appelé la Chine à « des mesures rectificatives immédiates ».

 

Selon des sources diplomatiques, une vingtaine de pays d’Afrique ont préparé une missive à l’intention de Pékin dans laquelle ils estiment que les dépistages et la quarantaine imposés spécifiquement à leurs ressortissants équivalent « à du racisme ». La « note verbale » dénonce « une violation évidente des droits de l’homme ».

 

« Xénophobie des autorités chinoises »

 

A l’origine de cette affaire, la fuite de cinq Nigérians de Canton positifs au Covid-19 et placés en quarantaine avait déclenché un tollé et un déluge de commentaires xénophobes sur Internet. D’après l’agence Chine nouvelle, 4 553 Africains, soit toute la population africaine de Canton, ont été soumis à un dépistage depuis le 4 avril – 111 d’entre eux se sont avérés positifs. Plusieurs Africains ont raconté à l’AFP avoir été chassés de leurs logements, puis refusés dans des hôtels et des restaurants, et ont finalement dû dormir à la rue ou sous des ponts sans rien à manger.

 

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L’affaire tombe au plus mal pour Pékin, qui a multiplié ces dernières semaines les offensives de charme sur le continent africain à travers l’envoi de médecins, de matériel médical et autres aides financières. D’autant que les Etats-Unis se sont engouffrés dans la brèche, dénonçant la « xénophobie des autorités chinoises », dans un contexte de confrontation stratégique entre les deux puissances mondiales.

L’administration de Donald Trump n’a pourtant pas jusque-là manifesté un intérêt particulier pour le continent africain. Mais elle met régulièrement l’Afrique en garde contre la Chine, dont les investissements et les prêts sont, selon Washington, motivés par d’arrière-pensées peu amicales. « Les abus et mauvais traitements à l’encontre des Africains vivant et travaillant en Chine rappellent tristement à quel point le partenariat entre la République populaire de Chine et l’Afrique est creux », a déclaré à l’AFP un porte-parole du département d’Etat américain.

 

« Partenaire et frère »

 

Face à cette pression diplomatique, la Chine a rejeté dimanche tout « racisme », promettant « d’améliorer » le traitement des Africains à Canton. Une vingtaine d’ambassadeurs africains ont en outre été reçus lundi au ministère des affaires étrangères à Pékin pour être rassurés. « Le peuple chinois a toujours considéré le peuple africain comme un partenaire et un frère qui partage les mêmes difficultés et les mêmes problèmes », a insisté un porte-parole, Zhao Lijian.

Depuis une dizaine d’années, la Chine est devenue le premier partenaire commercial du continent, devant les Etats-Unis et la France, distribuant des milliards aux pays africains pour la construction de grands projets d’infrastructures, souvent en échange de leurs ressources minières.

 

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Avec la pandémie, le secteur de la santé est devenu un nouvel instrument diplomatique pour Pékin, notamment via ses milliardaires philanthropes comme Jack Ma, le fondateur du géant de la vente en ligne Alibaba – membre du Parti communiste chinois – ou ses fleurons des télécoms, à l’instar de Huawei.

Fin mars, des millions de masques, de kits de test et de combinaisons de protection étaient ainsi généreusement livrés à Addis-Abeba, à destination de l’Union africaine, pour être redistribués sur le continent. Mais les dons se font aussi en bilatéral, comme cet avion chargé de matériel et transportant une équipe de quinze médecins chinois, qui a atterri le 8 avril à l’aéroport d’Abuja, la capitale nigériane.

 

L’Afrique du Sud, pays le plus touché du continent avec 2 272 cas de contamination confirmés dont 27 mortels, a elle aussi reçu ce mardi un deuxième lot de matériel médical gratuit, dont 50 000 masques chirurgicaux médicaux et 11 000 paires de gants chirurgicaux. Un troisième lot de matériel est attendu prochainement. L’occasion pour l’ambassade de Chine en Afrique du Sud de préciser que, depuis le début de l’épidémie, « la Chine a aidé les cinquante-quatre pays africains, y compris ceux qui n’ont pas établi de liens diplomatiques avec la Chine », et qui, il est vrai, sont de plus en plus rares à mesure que la Chine accentue sa présence sur le continent.

 

Le Monde avec AFP

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/04/15/coronavirus-et-discriminations-en-chine-l-afrique-monte-au-creneau_6036664_3212.html

 

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Coronavirus: la Chine corrige le tir vis-à-vis des Africains

 

RFI Afrique - Publié le : 15/04/2020 - 13:29

De notre correspondant à Pékin, Stéphane Lagarde

 

 

L’image de ces hommes d’affaires contraints à dormir sur les trottoirs de la capitale de la province du Guangdong, après avoir été chassés de leurs hôtels ces derniers jours, a provoqué une véritable crise diplomatique entre la Chine et le continent africain. Aujourd’hui, visiblement Pékin cherche à corriger le tir.

 

La vidéo diffusée sur les réseaux sociaux a, en effet, ravivé les braises de la colère des Africains de Canton. Voilà une semaine que la communauté dénonçait des mesures stigmatisantes, pour ne pas dire discriminantes, à son encontre.

 

Sous couvert de prévention d’une seconde épidémie de coronavirus en Chine via des cas de contaminations importées de l’étranger, des propriétaires ont chassé les Africains de leurs logements, les voyageurs de leurs hôtels. Jusqu’à présent, les autorités locales faisaient la sourde oreille, prétextant que la campagne de mise en quarantaine et de tests de dépistage de la pneumonie virale s’adressait à l’ensemble des populations sans exception.

 

Or, sur une vidéo postée ce week-end, un panneau rédigé en anglais montre clairement l’interdiction faite aux Noirs d’entrer dans un McDonald's de la ville.

 

Again, for those who still doubt that Black people and particularly #AfricansinChina are being targeted we feel it is our duty to share this. A sign at a @McDonalds restaurant seems to make this perfectly clear pic.twitter.com/FaveKrdQHi

 

  Black Livity China (@BlackLivityCN) April 11, 2020

 

Fureur des ambassadeurs qui, immédiatement, demandent des explications. Les diplomates africains de Pékin exigeant la cessation immédiate des tests forcés et les mises en quarantaine pour des personnes sans symptôme et sans contact avec des porteurs du virus. Message, semble-t-il, entendu par la diplomatie chinoise, pressée d’éteindre un vent contestataire qui ruine les efforts de la diplomatie sanitaire chinoise.

 

Canton va lever progressivement les restrictions dites « de santé » pour les ressortissants africains, a ainsi fait savoir lundi Chen Xiaodong, le Monsieur Afrique du ministère chinois des Affaires étrangères, à l’exception, précise toutefois le ministre adjoint, « des personnes soupçonnées d’être infectées ».

 

À noter également que lundi 13 avril, le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a eu un entretien téléphonique avec le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi.