Jacques Chirac : « Les Africains sont joyeux par nature »
par Dominique Dhombres Télévision : LE MONDE, 15 nov. 2004 (édition du 16 nov. 04)

Jacques Chirac répondait, un micro baladeur à la main, aux questions d'un millier d'étudiants rassemblés, dimanche 14 novembre, dans le grand amphithéâtre du palais du Pharo, à Marseille. Les journaux télévisés du soir n'ont retenu de cet exercice que les deux petites phrases visant respectivement Laurent Gbagbo et Nicolas Sarkozy.  Le premier était accusé de se diriger vers un « régime de nature fasciste ». Le second de vouloir imprudemment toucher une des « colonnes du temple » républicain, la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat. La diffusion en direct de ce débat sur Public Sénat, dimanche en fin de matinée, réservait d'autres surprises. Un étudiant demandait à Jacques Chirac ce qu'il pensait du fait que trois milliards d'habitants de cette planète vivaient avec 2 dollars par jour, c'est-à-dire moins que la somme versée, également chaque jour, par l'Union européenne pour chacune de ses vaches. Le président de la République défendait rapidement les vaches et leurs subventions, qualifiées de « faux problème », et se livrait à une confidence personnelle : «Chaque fois que je vais en Afrique, le chef d'Etat concerné vient me chercher en général très gentiment à l'aérodrome et, sur les quelques kilomètres du parcours, il y a toujours beaucoup de monde, et je regarde toujours attentivement ces gens parce qu'on apprend beaucoup plus dans un regard que dans un dossier », disait-il. Et que voit-il alors ? Des jeunes, beaucoup de jeunes, énormément de jeunes « qui ont entre cinq et quinze ans » et qui se tiennent sur le passage de sa voiture. « Ils sont joyeux, parce que les Africains sont joyeux par nature. Ils sont enthousiastes. Ils ont le sourire. Ils applaudissent. Ils sont contents. Ils voient qu'il y a un monsieur qui passe, cela leur permet d'être sur le bord de la route. Ils sont contents, bien ! », poursuit Jacques Chirac, qui se pose alors une question à lui-même. Que feront-ils quand ils auront vingt ou vingt-cinq ans, sans diplôme, sans travail, sans accès aux soins ? Alors qu'ils seront informés en permanence « par les moyens médiatiques modernes » de tout ce qui se passe ailleurs ? « Cela ne marchera pas ! Cela explosera d'une façon ou d'une autre ! » prédit Jacques Chirac. Faut-il voir un lien entre cette
prophétie et la situation actuelle en Côte d'Ivoire ? L'orateur est resté muet sur ce point.

[diffusion : MIR-France,   Thu, 18 Nov 2004 11:57:41 +0100 (CET)]

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