Selon la FAO, il faudra 30 milliards de dollars par an pour éradiquer le fléau de la faim

New York, Nations Unies, 03 juin 2008 - Le chef de l'agence des Nations Unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO), Jacques Diouf, a fustigé la nature « politique » de la crise alimentaire et lancé un très ferme appel aux leaders de la planète afin qu'ils consacrent 30 milliards de dollars par an à la relance de l'agriculture.

Dans un discours prononcé ce matin lors de l'ouverture du Sommet sur la crise alimentaire, qui se tient du 3 au 5 juin à Rome, Jacques Diouf a fait observer qu'en 2006 le monde a dépensé 1.200 milliards de dollars en armements alors que, dans un seul pays, les déchets alimentaires annuels atteignent 100 milliards de dollars et que l'excès de consommation des personnes obèses dans le monde coûte 20 milliards de dollars.

“Est-il possible dans ces conditions d'expliquer aux personnes de bon sens et de bonne foi que l'on ne peut pas trouver 30 milliards de dollars par an pour permettre à 862 millions d'affamés de bénéficier du droit humain le plus fondamental, celui à la nourriture, donc à la vie?” a insisté le directeur de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

Il a déploré le fait que cette crise soit “la chronique d'une catastrophe annoncée”.

En dépit de l'engagement solennel du Sommet mondial de l'alimentation de 1996 de réduire de moitié, à l'horizon 2015, le nombre de personnes qui ont faim dans le monde, les ressources pour financer les programmes agricoles dans les pays en développement, au lieu d'augmenter, ont nettement baissé depuis lors.

Mais “aujourd'hui, les faits sont là: l'aide à l'agriculture est passée de 8 milliards de dollars (base 2004) en 1984 à 3,4 milliards de dollars en 2004, soit une baisse en termes réels de 58 %”.

La part de l'agriculture dans l'aide publique au développement a chuté, passant de 17 % en 1980 à 3 % en 2006, a fait observer M. Diouf.

"C'est seulement lorsque les démunis et les exclus du banquet des riches sont descendus dans la rue pour exprimer leur désespoir et leur révolte, que les premières réactions salutaires, en faveur de l'aide alimentaire, ont commencé", a-t-il déploré.

“Personne ne comprend que dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique on puisse créer un marché de carbone de 64 milliards de dollars dans les pays développés mais que l'on ne soit pas en mesure d'avoir des financements pour éviter la déforestation annuelle de 13 millions d'hectares”, s'est exclamé M. Diouf.

Personne ne comprend que des soutiens de 11 à 12 milliards de dollars en 2006 aient été utilisés pour détourner de la consommation humaine 100 millions de tonnes de céréales pour notamment étancher la soif de carburant des véhicules.

Personne ne comprend, qu'en cette période de globalisation des échanges, aucun investissement sérieux ne soit engagé dans la lutte préventive contre les maladies transfrontières, notamment la maladie de Newcastle, la fièvre aphteuse, la fièvre de la Vallée du Rift, la péripneumonie contagieuse bovine et bien d'autres maladies.

Mais surtout, personne ne comprend que les pays de l'OCDE aient provoqué la distorsion des marchés mondiaux avec 372 milliards de dollars de soutien à leur agriculture en 2006, a encore dit M. Diouf.

"Le problème de l'insécurité alimentaire est de nature politique. C'est une question de priorités face aux besoins humains les plus fondamentaux. Et ce sont les choix des gouvernements qui déterminent les allocations de ressources", a conclu le directeur de la FAO.


FAO : communications et points de vue exprimés à l'ouverture du Sommet de Rome, 03 juin 2008 (dépêches)


Santé, actions humanitaires