LIBREVILLE, 17 mars 2003 (AFP) - 16h16 - Le président élu centrafricain, Ange-Félix Patassé, renversé samedi par un coup d'Etat à Bangui, semblait représenter un hôte encombrant pour le Cameroun, où il a trouvé refuge samedi par hasard, selon des sources concordantes à Yaoundé et dans la région.
Une source proche de la présidence camerounaise a indiqué lundi à l'AFP que des négociations étaient actuellement en cours "pour trouver un point de chute au président Patassé".
Le quotidien Cameroon Tribune et la radio nationale ont souligné, citant des sources gouvernementales, que le président "en détresse" était hébergé à Yaoundé pour "raisons humanitaires".
Mais le journal gouvernemental soulignait aussitôt, sur la foi des mêmes sources, que le Cameroun restait "fidèle à sa politique de neutralité et de non ingérence dans les affaires intérieures des autres Etats souverains, en l'occurrence la République centrafricaine".
Aucun commentaire donc sur la prise de pouvoir à Bangui par le général centrafricain François Bozizé, qui s'est auto-proclamé président dimanche, alors que les condamnations du putsch se multiplient depuis samedi à travers tout le continent africain.
M. Patassé a atterri samedi soir inopinément à Yaoundé. L'avion qui le ramenait sur Bangui en provenance de Niamey, où il avait participé vendredi à un sommet de chefs d'Etats, s'était dérouté en raison des premiers tirs dans la capitale centrafricaine.
Le Premier ministre camerounais, Peter Mafany Musonge, était venu l'accueillir à l'aéroport de Yaoundé.
M. Patassé, le visage fermé, et son épouse Angèle en larmes, avaient ensuite été conduits avec leur délégation à l'hôtel Hilton de Yaoundé, où ils étaient toujours hébergés lundi sous protection policière.
Le soir-même, le président Patassé avait reçu la visite du secrétaire général à la présidence camerounaise, Jean-Marie Atangana Mebara. Mais lundi matin, il n'avait toujours pas rencontré le président Paul Biya, selon des sources sûres à Yaoundé.
Cameroon Tribune croyait en outre savoir "de source bien informée" que M. Patassé s'était "engagé à ne faire aucune déclaration durant son séjour au Cameroun".
On ignorait lundi les raisons de cette gêne perceptible des autorités de Yaoundé. D'autant que le Cameroun a toujours semblé étranger aux soubresauts de la crise centrafricaine, à la différence du Tchad que M. Patassé accusait depuis novembre 2001 de soutenir le général Bozizé.
Ce dernier, officiellement réfugié à Paris, s'était évanoui depuis déjà plusieurs semaines dans la nature, avant de réapparaître subitement en Centrafrique pour diriger son coup d'Etat victorieux.
Le journal privé tchadien N'Djamena bi-hebdo s'était interrogé le 14 mars sur un possible retour du général Bozizé au Tchad, où il s'était d'abord exilé de novembre 2001 à octobre 2002.
D'autres sources bien informées à N'Djamena avaient au contraire affirmé à l'AFP que le chef de la rébellion centrafricaine était bien rentré dans son pays, mais par le Cameroun, et sous une fausse identité.
Dès dimanche, des sources diplomatiques africaines dans la région, ont indiqué à l'AFP que le président Patassé ne resterait pas au Cameroun.
Les capitales libyenne, Tripoli, et gabonaise, Libreville, étaient les pistes les plus évoquées selon ces sources. L'une d'elles précisait que Libreville avait la préférence de l'intéressé pour sa proximité avec Bangui.
Ange-Félix Patassé n'avait toujours fait lundi aucune déclaration publique.
Lors de ses contacts téléphoniques avec d'autres chefs d'Etats africains, il a manifesté, selon des sources informées, son souhait de reprendre tôt ou tard ses fonctions à Bangui.
François Bozizé s'autoproclame président de la Centrafrique
BANGUI (Reuters), 17 mars 2003 15:24 - L'ancien chef d'état-major des forces armées centrafricaines François Bozizé s'est autoproclamé président et a dissous le parlement centrafricain après avoir pris le pouvoir pendant le week-end à la faveur d'un déplacement à l'étranger du chef de l'Etat, Ange-Félix Patassé.
Bozizé a promis de collaborer avec les partis politiques en vue de préparer des élections dans l'ancienne colonie française.
"Nous suspendons d'ores et déjà la Constitution. Nous annonçons la dissolution de l'Assemblée Nationale et du gouvernement", a-t-il déclaré dimanche soir dans une allocution à la radio nationale.
"Toutefois, nous recevrons le plus rapidement possible les partis politiques et les représentants des forces vives de la nation afin de nous accorder autour d'un programme consensuel pour la transition", a-t-il ajouté.
Bozizé a évoqué également la mise en place d'un "conseil national de transition regroupant les véritables forces vives de la nation" qui servira notamment, a-t-il expliqué, à préparer "les échéances électorales à venir".
Profitant d'un déplacement au Niger de Patassé, les partisans de Bozizé ont pris samedi le contrôle de Bangui, contraignant le président élu centrafricain à se poser au Cameroun avec son épouse et son entourage.
Ses combattants ont pris le contrôle de sites stratégiques dont l'aéroport. Ils n'ont rencontré qu'une faible résistance, beaucoup de Banguissois ayant accueilli leur arrivée dans la ville par des acclamations et des applaudissements.
Trois soldats de la République du Congo (Congo-Brazzaville) faisant partie de la force de paix de la CEMAC déployée à Bangui, ainsi que deux rebelles ont été tués lors des combats. Par ailleurs, une dizaine de civils ont trouvé la mort au cours des pillages qui ont suivi.
Lundi, la ville semblait avoir retrouvé le calme. Un couvre-feu nocturne a été instauré pour empêcher les pillages. Les bâtiments officiels et les résidences des Français résidant à Bangui ont été particulièrement touchés. Environ 70 ressortissants français ont d'ailleurs été évacués vers le Gabon voisin.
L'histoire de la Centrafrique depuis son indépendance, en 1960, a été marquée par une succession de dictatures brutales, de soulèvements et de tentatives de putsch.
Dans un communiqué, le président sud-africain Thabo Mbeki a déclaré que le coup d'Etat de Bangui était un frein à la paix et à la stabilité en Afrique.
BOZIZE PRESENTE LES GRANDES LIGNES DE SON PROGRAMME
"Le continent africain ne tolérera jamais des transferts de pouvoir inconstitutionnels, quels qu'en soient les auteurs", a déclaré Mbeki, qui préside actuellement l'Union africaine.
Le quai d'Orsay a pour sa part appelé au "calme, au respect des personnes et des biens" par le biais de son porte-parole François Rivasseau. "Nous réiterons notre condamnation de toute prise de pouvoir par la force", a ajouté ce dernier, précisant que 150 Français se trouvaient encore dans le pays.
A Ouagadougou, le président burkinabè Blaise Compaoré a lui aussi condamné le putsch.
"Nous condamnons fermement cette déstabilisation de la République centrafricaine", a-t-il notamment déclaré.
"Nous attendons des Africains et particulièrement ceux de la région de l'Afrique centrale beaucoup plus d'engagement et de courage politique pour affronter ces événements et voir comment faire en sorte que le rétablissement d'un ordre républicain se fasse dans les meilleurs délais", a-t-il ajouté.
Au Gabon voisin, le gouvernement a annoncé que la force de paix africaine de la CEMAC était rentrée dans ses cantonnements à Bangui.
"Il faut souligner que les 310 membres de cette force ont été contraints de riposter en état de légitime défense", a-t-il déclaré dans un communiqué lu à la radio nationale.
Dans ce communiqué, il est également précisé que le président gabonais Omar Bongo a donné des instructions visant à préparer l'évacuation des soldats de maintien de la paix après celle des étrangers de Bangui.
Le ministère français des Affaires étrangères a indiqué pour sa part dimanche que l'ambassade de France continuait d'assurer le regroupement des résidents français et des étrangers qui veulent quitter la capitale centrafricaine.
Il a ajouté que des moyens militaires français avaient été amenés à Bangui en mission de soutien à la CEMAC. Des effectifs de l'ordre d'une compagnie seront mis en place à l'aéroport lundi, a indiqué le Quai d'Orsay.
Ange-Félix Patassé avait su déjouer plusieurs tentatives de coups d'Etat ou de mutineries grâce à l'aide de troupes libyennes et de rebelles congolais (ex-zaïroise). Mais les Libyens ont été officiellement remplacés par un embryon de force de paix de la Cemac forte d'environ 350 hommes, et les rebelles, fidèles à Jean-Pierre Bemba, se sont retirés du pays.
En tant que nouveau dirigeant autoproclamé de la Centrafrique, Bozizé a évoqué en présentant les grandes lignes de son programme "la poursuite des discussions avec les institutions de Bretton Woods, la réunification et la reconstruction de l'armée nationale, un vaste programme de désarmement de (la Centrafrique) (devenue) une poudrière et la restructuration et la redynamisation de l'administration publique".
par Biti Molomo (Copyright © 2001 Reuters Limited)
YAOUNDE, 17 mars 2003 (AFP) - 14h02 - Le président élu centrafricain Ange-Félix Patassé, renversé samedi par un putsch alors qu'il se trouvait au Niger, a été accueilli au Cameroun pour "raisons humanitaires" et s'est engagé à ne pas s'exprimer publiquement, a indiqué lundi le quotidien gouvernemental Cameroon Tribune.
"La fraternité, l'hospitalité africaine et les raisons humanitaires ont guidé la décision de Yaoundé", a accueillir Ange-Félix Patassé sur le sol camerounais, a indiqué le journal, citant des sources gouvernementales.
Cameroon Tribune affirme également sur la foi d'une source "bien informée" que le président Patassé, hébergé depuis samedi soir à l'hôtel Hilton de Yaoundé, "s'est engagé à ne faire aucune déclaration durant son séjour au Cameroun".
"Le Cameroun, tout en accueillant Ange-Félix Patassé, reste fidèle à sa politique de neutralité et de non-ingérence dans les affaires intérieures des autres Etats souverains, en l'occurrence la République centrafricaine", souligne le journal, en citant les mêmes sources gouvernementales.
Le journal rappelle que "le Cameroun a eu, par le passé, à accueillir une autre personnalité de haut rang en détresse, (l'ancien président tchadien) Hisssène Habré, qui s'était par la suite réfugié au Sénégal".
Des sources proches de la présidence camerounaise ont indiquées à l'AFP que des négociations sont en ce moment en cours, pour "trouver un point de chute au président Patassé", sans mentionner aucun pays.
Des sources diplomatiques africaines jointes dimanche par l'AFP depuis Libreville avaient évoqué les capitales gabonaise, Libreville, et libyenne, Tripoli.
A son arrivée au Cameroun, le président Patassé avait eu des entretiens avec le Premier ministre camerounais, Peter Mafany Musonge, et le ministre d'Etat, secrétaire général à la présidence, Jean-Marie Atangana Mebara.
M. Patassé, qui dirigeait la Centrafrique depuis 1993, a été renversé samedi par son ancien chef d'état-major, le général François Bozizé, chef de la rébellion centrafricaine, à la faveur d'un coup d'Etat éclair.
LIBREVILLE, 17 mars 2003 (AFP) - 13h57 - La Fédération internationale des Ligues des droits de l'Homme (FIDH) a condamné lundi avec "la plus grande vigueur" le coup d'Etat du général François Bozizé, samedi en Centrafrique, dans un communiqué reçu lundi par l'AFP à Libreville.
La FIDH "condamne avec la plus grande vigueur le coup d'Etat du général François Bozizé" et avec "la plus grande fermeté les modes d'accession violente au pouvoir", selon ce communiqué.
Réagissant à la suspension de la Constitution, à la dissolution de l'Assemblée nationale, au limogeage du gouvernement centrafricains annoncés dimanche soir par le général Bozizé, elle "appelle les nouvelles autorités de facto à rétablir sans délai la légalité constitutionnelle".
L'organisation "dénonce les graves violences qui accompagnent cet ultime coup de force et en particulier les pillages systématiques en cours", faisant référence aux nombreux morts et blessés ainsi qu'à la mise à sac du centre de Bangui.
La responsabilité en incombe non seulement aux "putschistes, mais aussi (à) toutes les forces ayant participé à la déstabilisation de la RCA", accuse la
"La FIDH appelle les mercenaires et les forces étrangères qui seraient impliqués dans les derniers événements à quitter sans délai la RCA", et demande aux "putschistes et à l'ensemble des forces en présence, à se conformer strictement au respect des normes fondamentales du droit international humanitaire et des droits de l'Homme (...)", est-il ajouté.
"Elle leur rappelle leur obligation, en particulier, de protéger les populations civiles en toutes circonstances", poursuit le communiqué.
PARIS, 17 mars 2003 (AFP) - 13h55 - L'Assemblée parlementaire de la francophonie condamne le coup d'Etat en Centrafrique, dans un communiqué publié lundi à Paris et appelle à la "restauration de l'unité du pays et au rétablissement de la paix civile".
"Fidèle à ses positions en faveur de la défense de l'Etat de droit et de la démocratie représentative, l'Assemblée parlementaire de la francophonie condamne fermement la prise de pouvoir par la force en Centrafrique le 15 mars", indique le communiqué.
"C'est sur les critères de restauration de l'unité du pays, rétablissement de la paix civile et respect des principes démocratique que sera jugé le nouveau pouvoir" ajoute-t-il.
L'Assemblée "exige, dans l'immédiat, que soit mis un terme aux exactions et pillages et que soit assurée la sécurité de tous".
BANGUI, 17 mars 2003 (AFP) - 13h25 - Edifices publics, commerces et entreprises pillés, parfois saccagés: le centre de Bangui, la capitale centrafricaine, offrait lundi matin un spectacle de désolation, deux jours après le coup d'Etat du général François Bozizé, a constaté un journaliste de l'AFP.
Selon certains témoins, quelques rebelles ont participé aux côté de la population à la mise à sac du centre de Bangui.
Excepté un complexe commercial, toutes les entreprises, telles que la Socacig, société centrafricaine des cigarettes du groupe français Bolloré, les pâtisseries, papeteries, et pharmacies, ont été vidées de leurs contenus et le plus souvent saccagées.
Un immeuble en construction en plein centre de Bangui a subi le même sort, tout comme de nombreux départements ministériels.
Le bâtiment abritant les ministères de l'Intérieur, du Commerce et de l'Education nationale, a également été incendié par les pillards.
Selon de nombreux témoins, plusieurs véhicules appartenant à des particuliers ont été volés à leur domicile par des hommes armés qui ont pris par la force de l'argent ou des biens de valeur (télévisions, bicyclettes, etc.) dans les maisons.
Lundi matin, la circulation a repris sur l'avenue David Dacko et l'avenue Boganda, et les taxis et taxis-bus circulaient à nouveau.
En revanche les grandes avenues de l'Indépendance et des Martyrs étaient quasiment vides. La Radio nationale a lancé des appels aux conducteurs de transport public à reprendre le service pour conduire les Banguissois sur leur lieu de travail.
Mais les quelques personnes qui se sont rendues en ville n'ont pu travailler, leurs bureaux ayant été pillés et saccagés.
Le personnel de la Socatel (télécommunications) n'a pu retenir ses larmes en découvrant le spectacle offert par les locaux de la direction générale de cette société centrafricaine.
Le bilan des victimes des pillages semble s'être alourdi depuis dimanche. Selon des sources hospitalières, 13 corps et plusieurs dizaines de blessés par balle ont été conduits dans les hôpitaux.
BANGUI, 17 mars 2003 (AFP) - 13h23 - Au moins treize personnes sont mortes et des dizaines ont été blessées à Bangui à la suite du coup d'Etat de samedi conduit par le général centrafricain François Bozizé, ont indiqué lundi des sources hospitalières.
Treize corps et plusieurs dizaines de blessés par balle ont été conduits dans les hôpitaux, selon ces sources.
Dimanche, le bilan était de cinq morts et de dizaines de blessés, selon une source hospitalière. Trois soldats congolais de la force africaine déployée à Bangui ont également été tués samedi.