Le gouvernement centrafricain crée un comité pour rapatrier les réfugiés

NAIROBI, 4 décembre 2001 (IRIN) - En coordination avec un appel lancé vendredi par le président de la République centrafricaine (RCA), Ange-Félix Patassé en faveur du rapatriement en RCA des réfugiés dans la République démocratique du Congo (RDC), le premier ministre de la RCA, Martin Ziguele, a présidé jeudi la création d'un " comité de réception et d'accueil ", a rapporté l'agence Centrafrique-Presse.

"J'ai donné mes instructions pour que le gouvernement organise, avec l'assistance des organisations internationales, le retour de ces compatriotes dans la dignité et la fraternité", a indiqué M. Patassé dans un discours à la nation le 1er décembre, à l'occasion de la journée de l'indépendance de la RCA.

Des milliers de personnes ont fui une tentative de coup d'état le 28 mai, et les hostilités qui s'étaient produites au début du mois de novembre lorsque l'ancien chef de l'état major de l'armée, François Bozizé avait refusé de se rendre à la police pour interrogatoire au sujet du putsch avorté.

Beaucoup de réfugiés, dont le nombre est estimé entre 15 000 et 20 000, appartenant à l'ethnie Yakoma, qui avaient fui Bangui en franchissant le fleuve Oubangui du côté de la RDC au lendemain du coup manqué, ont exprimé leur réticence à retourner par crainte de représailles. Le cerveau présumé du coup d'état et ancien président, le général André Kolingba, est un Yakoma.

Le comité sera présidé par le ministre de la Justice de la RCA, Marcel Metefara. Il inclura des représentants du gouvernement, des partis politiques et de la société civile, de même que des représentants internationaux de l'ONU et des ambassades à Bangui.

L'opération se déroulera en deux phases. La première sera conduite à Zongo, dans le nord-ouest de la RDC, où beaucoup de réfugiés de la RCA se sont établis, et englobe une campagne pour informer les réfugiés au sujet de l'initiative, pour enregistrer ceux qui souhaitent retourner en RCA, et pour déterminer quel type d'assistance leur sera nécessaire après leur rapatriement. La deuxième phase consistera à établir une aire de réception dans le port de Bangui, équipée de structures et de personnel médicaux pour évaluer la santé des rapatriés. Le transport des réfugiés sera assuré par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). La sécurité sera assurée par des représentants de la police de la RCA et des services des pompiers, ainsi que par la police civile du Bureau de l'ONU en RCA (plus connu par son sigle français BONUCA).

Les premiers réfugiés doivent arriver à Bangui le 6 décembre, où ils seront accueillis par M. Ziguele.

Dans son discours, M. Patassé a aussi annoncé la levée du couvre-feu, imposé à l'issue des événements du 28 mai de 21 heures à 5 heures temps local dans l'ensemble de la RCA, " afin de ne pas nuire à l'économie ", a-t-il indiqué.

D'un autre côté, le président soudanais Omar Al-Bashir, en sa qualité de président de la Communauté des Etats du Sahel saharien (COMESSA) à Khartoum, Soudan, a eu une réunion lundi pour se pencher sur l'instabilité actuelle en RCA. Y ont assisté des représentants la RCA, du Tchad, de la Libye, du Soudan et de la Zambie, ainsi que du BONUCA. Les discussions doivent se poursuivre mardi à Libreville, la capitale gabonaise, sous les auspices de la Communauté économique et monétaire des Etats de l'Afrique centrale (CEMAC).

Ancienne colonie française, la RCA a une histoire de soulèvements militaires, avec trois grandes rébellions contre l'actuel président, Ange-Félix Patassé depuis 1996. L'an dernier, l'ONU a achevé une mission de maintien de la paix qu'elle y avait envoyé en 1999 pour remplacer une force africaine appuyée par la France qui avait rétabli l'ordre à l'issue de mutineries dans les années 1990, mais le Secrétaire-Général de l'ONU a averti en janvier que la paix était en péril.

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Les réfugiés réclament des garanties avant de rentrer (AFP, Bangui, 5 déc. 2001 - 18h24)

Initialement prévue pour démarrer jeudi, l'opération de rapatriement des réfugiés centrafricains installés à Zongo, en RDCongo, pourrait être reportée de plusieurs jours à la suite de plusieurs demandes exprimées par ces réfugiés, a-t-on appris mercredi de source proche du comité d'accueil chargé de leur retour.

Selon cette source, les réfugiés, à l'issue d'une assemblée générale, ont adressé un mémorandum au gouvernement dans lequel ils "exigent la mise en liberté sans condition des personnes prises en otage par la commission mixte d'enquête" judiciaire chargée de faire la lumière sur la tentative de coup d'état du 28 mai dernier.

Les réfugiés, qui ont gagné la RCD à la suite du putsch manqué, réclament également "le versement des salaires retenus (NDLR: les fonctionnaires réfugiés n'ont pas perçu leurs salaires depuis les événements), la création d'une commission internationale d'enquête, le désarmement des milices du MLPC (Mouvement pour la libération du peuple centrafricain, au pouvoir)".

Selon un membre du comité ayant requis l'anonymat, "les réfugiés ont encore peur et ils ne sont pas tous prêts à regagner leur pays parce que beaucoup pensent que les hostilités pourraient reprendre d'un moment à l'autre".

Les réfugiés appartiennent pour la plupart à l'ethnie minoritaire yakoma, celle de l'ancien président André Kolingba auquel les autorités imputent cette tentative de coup d'état.

Mis en place le 29 novembre, le comité d'accueil pour le retour des réfugiés tenait une réunion plénière mercredi à la Primature. Ce comité est présidé par le ministre centrafricain de la Justice Marcel Météfara. Il comprend notamment des représentants de plusieurs ministères, de la société civile, de la communauté internationale (Etats-Unis, France, Russie) et de diverses agences de l'ONU.

Des personnalités centrafricaines reconnues pour leur neutralité, telles que l'archevêque de Bangui Joachim N'dayen, ou le révérend David Zokoué, en font également partie.

Entre 12.000 et 15.000 Centrafricains avaient fui Bangui lors des événements de mai dernier pour se réfugier à Zongo, localité congolaise en face de la capitale centrafricaine, sur l'autre rive du fleuve Oubangui.

Selon le président de la commission mixte Joseph Bindoumi, 70 personnes détenues à la suite du coup d'état devaient être présentées à la justice et 628 autres jugées par contumace.

Le retour des réfugiés centrafricains de RD Congo débutera le 6 décembre (2 déc. 2001)