Autonomie régionale? Pourquoi pas! Analyse, de la faiblesse politique

"Tout progrès est précaire, et la solution à un problème

nous met en face d’un autre problème."

Révérend Martin Luther King, Jr

Nous voudrions d’abord remercier l’auteur de la rebuffade de l’idée d’administration autonome des préfectures pour l’honnêteté de sa réaction. Cependant, la lecture de l’article relève plusieurs incorrections dont je ne vais mentionner que quelques unes. L’auteur de l’article insinue que notre décision de penser et d’avoir le courage de parler ouvertement d’une alternative susceptible de paver la voie du développement des préfectures et de la Centrafrique dans son ensemble serait selon lui "faire preuve de cécité intellectuelle et historique" et que ce faire indiquerait pour ma part une spécialité "dans l’art de l’esquive." Ces expressions de l’auteur semblent être les conclusions généreuses et gratuites de sa lecture de notre article, et cependant, ne sont appuyées par aucun argument qui les soutienne. Où donc a-t-il lu que nous écrivions que le problème de la Centrafrique ne se situait qu’au niveau juridique? Est-ce que les lacunes de cette démarche en saut de puce seraient révélatrices de l’intellectualité de son auteur? Nous sommes cependant ravis que l’auteur, après le long silence qu’il s’était lui-même imposé, trouve enfin le moment venu de passer à l’action.

Notre analyse personnelle des difficultés politiques qui sont des obstacles au développement de la Centrafrique nous avait fait tirer la conclusion que la faiblesse des institutions de ce pays serait l’explication majeure des maux que le pays éprouve. Ces maux avaient sous tous les rapports détourné le pays de la matérialisation des objectifs réels de développement économique et social, auxquels tous ses citoyens aspirent. Voici à titre d’illustration quelques exemples des prestations d’une administration centralisée. Bokassa avait fait construire une vingtaine de logements dans le village de Boyali sur la route de Mbaiki, alors que les commissariats de police des villes de l’intérieur manquaient de logements pour les officiers qui y étaient affectés. Kolingba avait fait construire un collège et un lyçée à Kembé qui ne comptait qu’une cinquantaine de ménages, alors le lyçée de Fatima, les écoles Lakouanga, Ben Zwi, Ngou-ciment, Yakité et Gbaya-Dombia manquaient de salles de classe pour des milliers d’élèves. Patassé voulait détourner une partie des eaux de l’Oubangui pour alimenter le Lac Tchad qui s’asséchait, alors que la navigation sur le fleuve Oubangui ne pouvait se faire toute l’année pour le ravitallement du pays en marchandises et hydrocarbures. L’ironie est que ce développement est encore, 43 ans après la proclamation de l’indépendence de ce pays, ce à quoi s’emploient le dialogue national, ces échanges épistolaires, les partis politiques, et la société civile. Toutefois, il est important de rappeler, une fois encore, ici, que l’abolition de la Constitution du pays, la faiblesse des vestiges des institutions démocratiques, la non observation des règles républicaines, l’absence de la définition d’engagements politiques pertinents, l’inexistence d’une classe politique honnête et dévouée, et les sauts d’obstacles imposés à la démocratie par certains partis politiques et par les militaires avaient toujours été ce qui avait tenu ce développement harmonieux en otage. La main-mise des politiciens, militaires, et autres mercenaires sur toute la machine de l’état, susceptible d’aider à l’accomplissement de ce développement harmonieux, est ce que nous avions déterminé comme étant le premier grand obstacle à franchir. Et l’autonomie des régions étaient, selon nous, un moyen pour y arriver. La Centrafrique ne pourrait jamais prétendre au progrès dans ce contexte de coups d’état à volonté, de criminalité impunie, et d’inefficacité de l’administration centrale. Et comme nous sommes personnellement opposés en principe à toute forme de coup d’état, nous avons pensé que le peuple pourrait retrouver le contrôle de sa destinée et commencer le processus d’un développement économique et social véritable si et seulement si celui-ci réclamait et obtenait l’autonomie administrative des régions, afin de conduire certaines actions que j’avais indiquées dans l’article précédent.

Nous avions donc identifié un problème que nous jugions majeur et faisions à titre personnel la proposition d’une autonomie tous azimuts des préfectures pour essayer de faire un inventaire des options possibles et réunir un consensus qui pourrait appporter un progrès rapide et concret. Mais seulement voilà, l’auteur en sortant de son silence, a voulu tourné en dérision par malice ou par pure ignorance, la proposition d’une autonomie régionale, sans apporter les preuves du ridicule et de l’inefficacité de l’idée, sur la base, fausse d’ailleurs, que nous accordions plus d’importance que nécessaire à l’aspect juridique de la chose et pas assez aux obstacles intrinsèques liés aux valeurs culturelles et civiques du citoyen. Dans un article, vieux de plus de 6 mois, affiché sur le site de "Bâtir-RCA", nous avions déjà écrit que nous aussi nous estimions que le citoyen centrafricain était également responsable des maux qui accablent la Centrafrique. Nous ne reviendrons pas sur ce point. Nous n’avions pas de solution concrète à proposer pour régler cet état de chose. Cependant, nous avions suggéré la recherche de solutions à travers une éducation civique à mener à très long terme.

L’auteur a également établi une longue liste de questions qui illustrereraient les maux centrafricains. Et celui-ci ne fait l’ébauche ni ne développe aucune solution à aucun des points qu’il a identifiés. Vers la fin de son article, il tire en ces mots la conclusion ci-après, que nous nous autorisons à reprendre textuellement: " Or pour que ce retard soir rattrapé; ce n’est pas l’autodétermination qui pourra le permettre; mais ce sera l’émanation d’une nouvelle race de politique; qui aura réalisé une rupture historique, culturelle et même spirituelle; qui pourront nous mettre sur la voie du progrès." Apparemment l’auteur n’aurait retenu que le seul terme autodétermination de sa lecture de notre texte et se serait refusé à en saisir l’idée principale. Nous lui en laissons donc la charge. Parlant d’émanation d’une nouvelle race de politique, quelles seraient donc, selon son auteur, les actions que cette nouvelle race apporterait? Celui voudrait-il nous laisser le soin de les deviner? Est-ce que dans la longue énumération de ses questions, celui-ci se serait égaré et aurait été incapable d’articuler ses pensées, puis de suggérer avec clarté par quel bout les centrafricains devraient s’organiser pour attaquer le sous-développement? Nous concédons que c’est là que réside toute la difficulté que les politiciens, militaires et autres activistes avaient toujours éprouvé et qui constitue l’obstacle majeur au développement. C’est peut-être pour cette raison que le pays tourne en rond depuis 43 ans. Son article illustre à merveille cette incertitude et cette cogitation qui voudrait inutilement s’affilier à la spiritualité. Nous nous arrêtons ici. Enfin, pour dire plus simplement les choses et relancer le débat sur l’autonomie des régions et les autres alternatives politiques, nous attendrons avec patience les réponses un peu plus constructives à la question de savoir quelles seraient les idées novatrices que le peuple centrafricain pourrait embrasser pour tirer la Centrafrique de ce mauvais guépier, si l’option de la décentralisation est a écarter?

Jean-Didier Gaïna
Virginie, Etats-Unis d’Amérique
(
12 déc 2003, 03:04:29 )

NB:
- droit de réponse de l’auteur suite à la réaction de C. B-MB dans l’article ci-après: (2)
L'Autodétermination n'est pas la panacée (10 décembre 2003);
- le premier document présenté en ligne (1) :
Auto-détermination des préfectures et développement auto-centré (7 décembre 2003), J-D.G

Regards et points de vue des partis politiques et mouvements centrafricains